Les annonces gouvernementales sur la réforme des retraites constituent un projet de régressions sans précédent, à la fois brutal et injuste. Le discours officiel qui prétend les justifier par de supposées difficultés démographiques en masque la finalité essentielle : faire payer la crise aux salariés et retraités….

Les mesures et communiqués

discours Eric Woerth

présentation de la réforme

Les annonces gouvernementales sur la réforme des retraites constituent un projet de régressions sans précédent, à la fois brutal et injuste. Le discours officiel qui prétend les justifier par de supposées difficultés démographiques en masque la finalité essentielle : faire payer la crise aux salariés et retraités.

Avec le décalage de deux ans à un rythme rapide de l’ensemble des bornes d’âge (âge d’ouverture des droits et à partir de 2016 âge de départ sans décote), tous les salariés vont devoir travailler plus longtemps pour des retraites plus basses. Les fonctionnaires vont en outre avec l’alignement du taux de cotisation voir leurs salaires nets baisser de façon sensible, de l’ordre d’un jour de salaire par mois à terme.

Aucune mesure n’est de nature à améliorer l’emploi, notamment celui des « seniors », alors que chacun sait qu’il s’agit d’une variable fondamentale pour l’équilibre des régimes de retraite.

Au total ce sont les salariés qui vont subir l’essentiel de l’effort dans des conditions qui vont accroître les inégalités: les femmes et les jeunes vont être particulièrement pénalisés comme tous ceux qui ont connu des périodes de précarité.

L’effort demandé aux hauts revenus et aux entreprises ne couvrira au mieux que 10% des besoins de financement, bien moins que ce qui est exigé des fonctionnaires. Même si devant les mobilisations le gouvernement ne remet pas en cause dans ses actuelles propositions la règle des six derniers mois, les fonctionnaires, outre les mesures d’âge communes à tous les salariés, vont se voir imposer des régressions qui correspondent à terme à 5 milliards d’euros alors que les prélèvements sur le capital et les hauts revenus se monteraient à seulement 4,6 milliards.

En outre seront particulièrement touchées d’une part les plus basses pensions de la Fonction Publique -avec la restriction de l’accès au minimum garanti actuellement versé à des milliers d’agents – et d’autre part les mères de famille, avec la mise en extinction des départs avant 60 ans des parents de trois enfants (16000 départs par an).

Dans le même temps rien n’est envisagé pour améliorer les conditions de travail, et bien loin de prendre en compte la pénibilité dans une dimension collective, ce projet comporte de nouvelles régressions en réduisant à une infime minorité les cas susceptibles d’être pris en compte.

De plus, aucune mesure n’est proposée pour la prise en compte des années d’études.

Derrière ces annonces de nouvelles régressions sont mises en perspective puisqu’elles prévoient des dispositifs visant à ajuster les mesures en cas de déficit accru, par exemple le gel de pensions.

Le gouvernement a fait le choix d’une réforme bien plus brutale que ce qui s’est fait dans la plupart des autres pays et d’une rigueur qui va creuser les inégalités, risque de compromettre la reprise économique et de surcroît ouvre la porte à une spirale de régressions.

Seule une mobilisation massive et résolue peut permettre d’obtenir le retrait de ce projet.

La FSU appelle à participer massivement par la grève et les manifestations à la journée unitaire de mobilisation interprofessionnelle du 24 juin et à préparer des suites offensives dès la rentrée.

Communiqué FSU

Les Lilas le 16 juin 2010

Communiqué ATTAC / Fondation Copernic

Un verdict couperet pour les retraites : la répartition guillotinée


Ainsi, le gouvernement a-t-il tranché comme ses prédécesseurs l’avaient fait en 1993 et en 2003, en n’écoutant que le chant du Medef et restant sourd à toutes les propositions émanant de la société ne rentrant pas dans sa logique. Avant même qu’il entame un simulacre de concertation tout était dit : hors de l’obligation de travailler toujours plus, point de salut pour les retraites, et surtout pas de quartier pour les retraités.


Refusant de reconnaître que le niveau moyen des retraites par rapport aux salaires avait reculé de 15 à 20 % parce que nombre de salariés ne pouvaient déjà pas satisfaire à l’obligation actuelle de cotiser 40,5 ans et parce que les deux tiers d’entre eux étaient déjà hors emploi à 60 ans, il va encore aggraver cette baisse du niveau des pensions en portant la durée de cotisation à 41,5 ans en 2020.


Alors que l’âge moyen de cessation d’activité est inférieur à 59 ans, le gouvernement recule l’âge légal de départ à 62 ans dès 2018, ce qui est encore plus rapide que ce qui était
envisagé,
et, de manière parallèle, celui auquel on peut partir à taux plein, c’est-à-dire sans décote. Seront particulièrement pénalisés, non seulement ceux qui auront commencé à travailler tôt, mais aussi de nombreux salariés, essentiellement des femmes, qui devront attendre plus longtemps, en situation de précarité, l’âge du taux plein pour ne pas subir de décote. Annoncé comme devant être une « réforme juste », le projet présenté ne comporte rien qui soit à même de réduire les inégalités de pensions entre les hommes et les femmes et au contraire, celles-ci ne pourront que se creuser.


Donnant pleine satisfaction au patronat, il n’envisage de prendre en considération la pénibilité du travail qu’au cas par cas et ce sera au salarié de faire la preuve médicale que son métier a été pénible. La retraite devient vraiment une affaire de gestion individuelle dans laquelle le droit collectif à la protection disparaît.


Poursuivant la même tactique politicienne de division du salariat, les fonctionnaires sont encore montrés du doigt et pénalisés, alors que, à qualification égale, le niveau de leur pension est équivalente à celle des salariés du privé comprenant le régime général de base et le régime complémentaire. L’augmentation du taux de cotisation pour les fonctionnaires n’est en fait qu’une façon déguisée de baisser leur salaire.


Par petits bouts, à tour de rôle, toutes les catégories voient leurs conditions se dégrader, chaque recul de l’une servant à justifier le recul de la suivante, avec une double, voire triple peine pour les femmes, les travailleurs précaires et ceux qui sont restés longtemps au chômage. En condamnant les salariés âgés à travailler toujours plus tard, on aggrave les difficultés d’entrée dans la vie active des jeunes. L’Insee vient d’établir que dans le contexte de la crise, le taux de chômage des jeunes s’est encore accru, de même que la proportion de salariés, hommes et femmes, en sous emploi.


Commencée sur la base d’un mensonge grossier « il n’y a qu’une solution, travailler plus », la contre-réforme Sarkozy-Fillon-Parisot s’achève en prévoyant un nouveau hold-up sur la richesse produite par les travailleurs. Le gouvernement et le patronat ont nié la possibilité de trouver de véritables sources de financement supplémentaire parce qu’ils entendaient conserver « l’acquis » des classes possédantes au cours des dernières décennies. La baisse historique de la part salariale dans la richesse produite est entérinée. Pourtant, la soumission à cotisation des revenus financiers distribués par les entreprises à leurs actionnaires et créanciers permettrait de réunir des ressources supérieures au déficit de toutes les caisses de retraite, et cela dès aujourd’hui et pour demain. Le gouvernement se contente de prévoir un prélèvement sur le capital ridiculement bas de 3,7 milliards en 2010 alors que le déficit annoncé dépasse 32 milliards.


Au-delà des contrevérités que gouvernement et patronat assènent quotidiennement en matière de financement des retraites, ce qui est en jeu, c’est la place du travail dans la vie, la place des travailleurs et des retraités à qui il n’est reconnu que le devoir d’exister comme subordonnés à l’exigence du capital et uniquement comme tels. Ce qui est en jeu aussi, c’est le type de développement humain qui est promu : à la nouvelle contre-réforme des retraites correspond un modèle d’où est exclue la possibilité d’utiliser les gains de productivité pour réduire la durée du travail et dans lequel la société est vouée à jamais au productivisme.


Tout cela serait simplement absurde si cela n’intervenait pas dans un moment caractérisé par une crise majeure, inédite par les multiples dimensions qu’elle comporte, du financier à l’économique, du social à l’écologique, et du politique au culturel. En un mot, la destruction progressive des retraites par répartition est la figure de proue de la stratégie des classes dominantes cherchant à faire d’une pierre deux coups : faire payer la crise aux salariés, aux retraités et aux populations les plus fragiles, et trouver de nouveaux espaces à la marchandisation et à l’accumulation financière. Ce n’est pas simplement absurde, c’est mortifère pour la société.

Les principales mesures (résumé journal Le Monde)


La réforme des retraites, arbitrée mardi 15 juin par Nicolas Sarkozy, comporte une vingtaine de mesures. Elle prévoit de ramener le système français de retraite, actuellement déficitaire de 32 milliards d’euros, à l’équilibre en 2018. Les mesures permettront de réduire de près de 50 % le déficit en 2018. S’y ajouteront 4 milliards d’euros d’économies supplémentaires réalisées dans la fonction publique et 4,4 milliards de recettes en plus, via la taxation des hauts revenus et des revenus du capital. Le financement des déficits accumulés sera repris au fur et à mesure par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), qui pourra compter sur les ressources du Fonds de réserve des retraites.


Eric Woerth, ministre du travail, a longuement détaillé les mesures proposées par le gouvernement, au cours d’une conférence de presse mercredi matin. Voici les principales mesures arrêtées par le chef de l’Etat :


Augmentation de la durée d’activité


  • Relèvement progressif, à raison de 4 mois par an à partir de la génération née en 1951, de l’âge légal de départ à la retraite, lequel sera ainsi porté pour tout le monde à 62 ans en 2018. Parallèlement, l’âge de départ à la retraite, qui permet automatiquement de toucher une pension à taux plein, sera progressivement porté de 65 à 67 ans. Les fonctionnaires seront logés à la même enseigne que les salariés du privé. Ceux des catégories actives (policiers, militaires, sapeurs-pompiers…), autorisés actuellement à partir à 50 ou 55 ans, verront cet âge de départ relevé progressivement de deux ans. Les salariés des régimes spéciaux ne seront concernés qu’à compter de 2017 par les mesures d’âge.

  • La durée de cotisation sera portée à 41 ans et 1 trimestre pour les générations 1953 et 1954 et à 41,5 ans en 2020.

  • Carrières longues et pénibilité : les salariés ayant commencé à travailler avant 18 ans pourront continuer à faire valoir leurs droits à la retraite entre 58 et 60 ans sous réserve de justifier de la durée de cotisations nécessaire plus deux ans. Au total, le dispositif concernera 50 000 personnes en 2011 et 90 000 en 2015. Les assurés dont l’état de santé est dégradé du fait de leur exposition à des facteurs de pénibilité garderont la possibilité de partir à 60 ans avec une retraite à taux plein quel que soit leur nombre de trimestres. Selon le ministre du travail, 10 000 personnes par an bénéficieront de ce droit nouveau.

Développement de l’emploi des seniors


  • Aide à l’embauche pendant un an pour les demandeurs d’emploi de plus de 55 ans et renforcement du tutorat.

Augmentation des recettes pour un montant de 3,7 milliards en 2011


  • Création d’un prélèvement de 1 % sur la dernière tranche de l’impôt sur le revenu, hors bouclier fiscal.

  • Augmentation d’un point des prélèvements sur les plus-values de cessions mobilières et immobilières et du prélèvement forfaitaire libératoire sur les dividendes et les intérêts.

  • Prélèvement accru sur les stock-options : passage de la contribution de l’employeur de 10 à 14 % et de la contribution du salarié de 2,5 à 8 % ; augmentation des prélèvements sur les retraites-chapeaux : le prélèvement de l’entreprise est appliqué dès le premier euro de rente versé ; une contribution sociale de 14 % est mise en place pour le bénéficiaire ; calcul annualisé des allègements de charges.

Renforcement de la convergence entre les régimes public et privé


  • Alignement du taux de cotisation du public (7,85 %) sur le privé (10,55 %) en dix ans. Fermeture du dispositif de départ anticipé sans condition d’âge pour les parents de trois enfants ayant 15 ans de service à compter de 2012.

  • Application de la même règle d’obtention du minimum garanti que dans le secteur privé.

  • Améliorer les mécanismes de solidarité

  • Les jeunes en situation précaire bénéficieront de trimestres validés supplémentaires lorsqu’ils sont au chômage non indemnisé. Le nombre de trimestres validés passera de 4 à 6.

  • Pour améliorer les retraites des femmes, l’indemnité journalière perçue pendant le congé maternité entrera désormais dans le salaire de référence sur lequel est calculée la pension de retraite. Les entreprises de plus de 300 salariés qui ne font pas de diagnostic de la situation salariale comparée des hommes et des femmes seront sanctionnées.

  • L’octroi du minimum vieillesse (709 euros pour un célibataire) aux agriculteurs sera facilité. Les terres agricoles et les corps de ferme ne feront plus l’objet d’un recours sur succession. Pour favoriser l’information des actifs, un point d’étape individuel sera systématiquement fait à 45 ans.